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Le pays de Saint Aubin du Cormier, un territoire d'une grande richesse

L’EPL de Saint Aubin du Cormier est situé sur les communes de St Aubin du Cormier, Gosné et Mézières/Couesnon, c’est à dire dans le pays de Fougères, et particulièrement dans une région historiquement dénommée « les marches de Bretagne » , à quelques 25 kms de Rennes.

Ce territoire présente des caractéristiques particulières, liées à sa situation géo-pédologique. Il est marqué par différents paysages et milieux :

Les paysages des « lignes de crêtes » : bois et landes

Situé sur les hauteurs du bassin rennais, le territoire est marqué par un relief qui le traverse d’ouest en est, là où affleure le grès armoricain, roche très dure qui forme les points culminants du site (123 m). Ces grès sont bordés de schistes durs et imperméables qui s’étendent sur les plateaux et les pentes jouxtant les crêtes (exemple de la lande de la rencontre). Les sols générés par ces roches sont tout à la fois peu profonds, pauvres en matière organique, acides et souvent hydromorphes du fait de l’imperméabilité de la roche. Ils sont donc très peu valorisables d’un point de vue strictement agronomique. C’est pourquoi ils supportent la présence de plusieurs massifs forestiers et des landes , dont les intérêts naturels patrimoniaux sont les suivants :

La forêt de haute-sève ou forêt domaniale de St-Aubin-du-Cormier

Ce massif de 800 ha présente de nombreux intérêts à la fois historique, paysager et écologique, du fait de plusieurs facteurs :

  • le relief marqué induit des conditions écologiques variables, et donc une grande diversité d’habitats
  • l’histoire du lieu, liée à sa position dominante, mais aussi aux défrichements, à la valorisation des landes puis à la replantation, a eu une influence toujours très sensible aujourd’hui
  • la présence d’une lentille calcaire à l’ouest de la forêt, et d’une tourbière acide au nord, contribuent à la diversité

Intérêts patrimoniaux de la forêt de Haute-Sève

 

Ecologique : Grande richesse botanique, marquée par des espèces protégées et rares à l’échelon régional : Pyrole, Prêle d’hiver, Lycopode, Linaigrette
grande diversité de milieux et d’habitats : tourbière,  landes, belles fûtaies de chênes rouvres, pinèdes, boisements alluviaux, …
Réservoir de faune pour le territoire : rapaces, grands mammifères (sanglier, chevreuil), martre, blaireau, pics, ...
intégré partiellement au réseau Natura 2000 de conservation des habitats européens (tourbière, site calcaire et chênaie-hêtraie à sous-bois de houx)
Historique : dolmens, fontaine minérale

Les bois privés

Bois de la Chaîne, du Milieu, d’Uzel, de Moroval, de Rumignon sont des vestiges de l’ancienne forêt qui couvrait l’ensemble de ce territoire. Aujourd’hui privés, ils contribuent à la qualité écologique par leur intérêt propre et par complémentarité avec la forêt domaniale (refuge, corridor).

Les landes

Landes d’Ouée, de la rencontre, de Moroval, du bois du milieu, sont aussi des vestiges du complexe de landes liées à la déforestation puis à la mise en valeur agricole. Il y a encore un siècle, elles étaient intégrées dans le système agricole, avant de tomber en désuétude. Le camp militaire de la lande d’Ouée a ainsi permis la préservation d’une lande de 130 ha.

Les landes : valeur patrimoniale


Ecologique : la lande d’Ouée est un vaste ensemble recelant une mosaïque de milieux (landes méso-hygro, moyennes, boisées..), riche d’une flore (Drosera spp., Gentiane pneumonanthe, Bruyères) et d’une faune remarquables. La présence importante du Maculinea alcon, un papillon myrmécophile, lui a donné même un intérêt national par le passé. Malheureusement, l'espèce semble avoir disparu du site récemment.

Elle est intégrée au site Natura 2000 avec l’étang d’Ouée.
les autres landes sont modestes en taille mais contribuent à la richesse globale.
Historique :  Les landes racontent l’histoire agronomique du lieu (présence de talus, ados, anciennes pratiques, …)

Ces lignes de crête ont aussi d’autres particularités :
Historiquement, elles ont servi de barrière entre la Bretagne et la France, ce qui explique deux éléments : premièrement, le château d’où la vue est imprenable sur la région de Fougères, et deuxièmement le site de la bataille de St Aubin du Cormier.
Géographiquement, elles font le partage des eaux entre celles qui vont vers la Manche (via le Couesnon), et celle qui vont vers l’Atlantique (via l’Illet, l’Ille puis la Vilaine). Nous sommes ici en tête de 2 bassins versants importants.

Les sites inscrits et sites classés

 

La zone du château, le bois de Rumignon et celle du site de la bataille (marquée

par un mémorial aux bretons près du bois d’Uzel) sont classés ou inscrits, ce qui démontre leur valeur historique.

Les zones agricoles : le paysage bocager

Autour de cette ligne de crête schisto-gréseuse, les schistes anciens briovériens qui constituent le bassin de Rennes, plus tendres, permettent une valorisation agricole plus marquée. Au-delà du Couesnon, le granite de la région de Fougères fait son apparition, générant des sols plus filtrants.

Le bocage est constitué de haies dont les caractéristiques sont les suivantes :
le talus est présent mais peu élevé (1 mètre)
un système de fossés permet un drainage et une évacuation de l’eau
la végétation est constituée d’une grande diversité d’espèces basée sur le Chêne pédonculé, le Merisier, l’Ajonc d’Europe, l’Aubépine. Il n’est pas rare de trouver des haies riches de + de 15 espèces ligneuses, comprenant l’Alisier torminal, le néflier, le poirier sauvage, ainsi que le frêne, l’aulne et le saule roux cendré en situation fraiche. Les pins ne sont pas rares dans le bocage.
La strate herbacée est souvent d’origine forestière : les myrtilles, bruyères cendrées et callunes, polypodes et autres fougères ne sont pas rares, mais elles risquent une banalisation complète par modification des pratiques d’entretien (broyage trop ras ou pire pesticides).
La densité du réseau est très variable. Les remembrements drastiques des années 60 sont encore visibles dans le paysage (commune de Saint-Marc sur Couesnon), mais le bocage reste relativement préservé autour du site, en particulier au sud (lande aux oiseaux).

surfaces cultivées principalement dédiées au système agricole bovin-lait, dont le pays de Fougères est  : prairies temporaires et permanentes omniprésentes, maïs relativement fréquent, blé ou triticale moins abondant. L’humidité des sols et leur faible profondeur rend difficile l’exploitation intensive de nombreuses parcelles, même après drainage.

Zones humides

Le caractère humide des sols du territoire, sa situation en tête de bassin sont à l’origine de l’abondance des zones humides :
la vallée du Couesnon : Cette rivière est reconnue au niveau régional à travers son potentiel écologique de rivière de première catégorie à salmonidés. Ces caractéristiques devraient déboucher dans les années qui viennent sur la mise en place d’une démarche concertée sur le bassin versant. D’autre part, la zone concernée est  un site à forte valeur paysagère et touristique : le Conseil Général a d’ailleurs acheté une partie de cette vallée dans le cadre des Espaces Naturels Sensibles, afin d’y assurer à la fois la conservation et la valorisation. Un site d’escalade et une base de canoé-kayak complètent le dispositif (base animée par l’association Evasion Nature 35 de Mézières/Couesnon).
L’étang d’Ouée : situé sur la commune de Gosné, cet étang de 80 ha est géré par l’ICIRMON (Institution du canal d’Ille et Rance Manche-Océan Nord) et la DDE. Il est riche floristiquement du fait de son caractère oligo-mésotrophe (faibles apports nutritifs), ce qui l’a fait intégrer dans le réseau Natura 2000.
L’étang de Basse Roussière : il appartient à la Fédération Départementale de Pêche d’Ille et Vilaine, qui l’utilise comme réservoir en vue de réempoissonner d’autres étangs ;
De nombreuses mares sont disséminées sur le territoire, contribuant à la richesse écologique des lieux, ne serait-ce que pour l’apport d’amphibiens (Tritons palmé, alpestre, marbré, Salamandre, Rainette verte, Grenouilles rousse, agile et verte, Crapaud commun)
Les sources sont nombreuses et donnent naissance à de petits ruisseaux asséchés naturellement l’été.

Conclusion sur le territoire

Le territoire considéré est très riche à la fois écologiquement et historiquement, ce qui s’est traduit par la mise en place de différentes mesures de reconnaissance (ZNIEFF : Zone Naturelle d’Intérêt Ecologique Floristique et Faunistique, Ministère de l’Environnement), de protection (Sites classés), et par l’intégration dans le site Natura 2000 des forêts des marches de Bretagne. L’ONF (Office National des Forêts), opérateur du site, a établi un Document d’Objectifs en 2004-2005, qui sert de référence pour les travaux sur ces espaces, auxquels l’EPL participe activement.

Le terme qui revient le plus souvent pour le qualifier est celui de diversité : en effet, les milieux sont nombreux mais aussi très imbriqués, participant ainsi à la multiplication des « effets de lisière », si importants en écologie. Le bocage joue alors un rôle très important de lien entre ces différents milieux (notion de corridor), contribuant énormément à la qualité écologique et paysagère du territoire.

A l’évidence, cette qualité écologique s’oppose à la pauvreté agronomique des terres. Pourtant, l’agriculture contribue à la diversité des sites et à leur entretien. L’enjeu est donc de maintenir une activité agricole viable tenant compte des intérêts patrimoniaux.

Jean-Luc TOULLEC.